Ezechiel & Kayla



On était samedi soir. Lorsque je sortis de chez moi, c'était bien évidemment pour pouvoir rammasser quelques proies à la sortie des bars ou des boîtes de nuit, histoire de me servir de dîner... Comme presque chaque semaine, d'ailleurs. J'avais besoin de toutes mes forces par les temps qui couraient. Si j'avais décider de me ranger dans le camps de Damon, il fallait en assumer toutes les conséquences... Dont celle de devoir me tenir toujours sur le qui-vive, dans l'attente d'une possible agression de la part de nos adversaires. Et encore, s'il n'y avait qu'eux ! Je devais aussi prendre garde aux loups-garous, aux sorcières mal attentionnées, et aux chasseurs... C'était la première fois en trois siècle que j'en voyais autant. Cette ville était le berceau des créatures surnaturelles, il en grouillait à chaque coin de rue. Pas étonnant que les humains se soient douté de quelque chose.

J'arrivai rapidement en plein coeur de la ville, et je traînai un peu au Grill le temps d'attirer dans mes filets deux joueurs de l'équipe de foot du lycée, que j'emmenai en dehors du bar pour pouvoir me nourrir en toute tranquillité. Je leur effaçai ensuite la mémoire, presque avec ennui. C'était devenu la routine... Mais depuis que Bella était sortie avec Damon, ma vie était devenue bien plus pimentée, il fallait l'avouer. Je m'inquiétais pour ma soeur, ces temps ci. C'était son deuxième gros chagrin d'amour après son aventure avec cet humain, qu'elle avait transformé contre son gré. Quel idiot ! Elle l'aimait au point de vouloir passer l'éternité avec lui, et fou de rage, il avait tenté de la tuer en réalisant ce qu'elle lui avait fait. Je pouvais admettre que ce ne devait pas être très agréable qu'on prenne cette décision concernant sa vie sans autorisation. Mais sa réaction avait été trop excessive, et elle avait profondément blessé Bella... Et maintenant, elle s'accrochait à Damon, alors que je voyais bien que pour lui sa relation avec elle était bel et bien terminée. Il avait tourné la page. Pas ma soeur.

Je quittai le renfoncement de la ruelle où je m'étais camouflée pour savourer mes deux jolis footballeurs, et avançai de quelques pas. Soudain, j'aperçus une silhouette se découper dans la lumière d'un réverbère, et je m'arrêtai net. Ces traits étaient bien trop familiers. Je me dissimulai dans l'ombre, attendant d'être sûre de l'avoir reconnu. Une fois que je fus certaine que c'était bien là celui qui avait essayé d'assassiner ma petite soeur, je sentis une vieille colère bouillonner en moi. Brusquement, il s'arrêta, et je distinguai dans la lumière blafarde une esquisse de sourire sur ses lèvres.

- Qui est là ?

- Ton pire cauchemar, lançai-je d'un ton sarcastique en m'avançant vers lui.

Quand je fus arrivée à sa hauteur, je croisai les bras sur ma poitrine et le toisai d'un air glacial.

- Ezechiel... Quelle surprise... désagréable.

Ezechiel & Kayla



Je me sentais comme un morceau de glace abritant un volcan en son coeur. Volcan qui n'allait pas tarder à exploser et répendre sa lave... Mais je n'aimais pas perdre le contrôle de moi même, je contins donc les pulsions meurtrières jouant en moi qui me hurlaient de me jeter sur ce petit vampire agaçant et n'en faire qu'une bouchée. Je n'aurais pas eu à lutter beaucoup, sans doute. J'étais bien plus âgée que lui. Mais j'étais assez curieuse de savoir pourquoi il était ici...

J'allais lui poser la question, mais il me devança. Ce qui m'irrita encore plus. Le petit Ezechiel prenait des risques à me mettre en colère. Le savait-il seulement ?

- Je suppose que Bella doit être aussi ici!?

- Perspicace, mon cher Ezechiel, répondis-je avec une désinvolture feinte. Effectivement, elle m'a accompagnée, c'est délicat de ta part de te souvenir que nous ne nous quittons presque jamais. Mais permet moi de te signaler... (Je perdis mon ton léger et mon regard se durcit.) Approche la, fait seulement un geste vers elle, et je te jure que tu es mort. Si je t'ai laissé la vie sauve la dernière fois, c'était juste pour lui épargner ce spectacle.

A ces mots, ce fut une vague de haine brûlante qui déferla en moi au souvenir du visage bouleversé de ma soeur après sa tentative de meurtre. "Pourquoi ?" criaient ses yeux. Je n'avais pas de réponse à lui donner. Elle ne les aurait pas comprises.

- Tu l'as blessée, l'accusai-je d'une voix que la colère faisait presque trembler. Elle a mis un temps fou à s'en remettre.

Mais pour qui se prenait-il, avec ses sourires et ses beaux principes ? Vraiment, Ezechiel commençait à me taper sérieusement sur les nerfs... Je tentai de me reprendre et respirai profondément, à plusieurs reprises. C'était il y avait très longtemps. Je n'aurais pas dû être si furieuse, mais avec tout ce qui touchait de près ou de loin à ma petite soeur, je me montrais spécialement suceptible.

- Peu importe, lâchai-je, d'un ton à nouveau froid et maîtrisé. Qu'est ce que tu fiches ici, Ez ? Répond moi franchement

Ezechiel & Kayla



*Respire, calme toi* m'ordonnai-je. Mais ce n'était pas si simple. Je fulminais littéralement. Il croyait vraiment, du haut de ses quelques années d'immortalité, que j'allais le laisser menacer ma soeur sans rien faire ? Eh bien dans ce cas, il... avait raison. Malheureusement, je ne pouvais rien faire dans l'immédiat si je voulais garder intacte ma relation bancale avec Stefan... Et je le voulais. Je n'avais rien contre Stefan, à part du dégoût pour son régime alimentaire. Je me forçai donc à me détendre, et réussis même à lui offrir un sourire forcé.

- Eh non, c'est nous les méchants, comme toujours... Mais tu sais quoi ? ça m'est complétement égal.

Je lâchai un rire sans joie. Comme si ç'a l'était vraiment. Il y avait longtemps que j'avais cessé de ne plus rien ressentir. Les émotions humaines étaient revenues, plus intenses et plus fortes qu'à l'époque où j'étais encore vivante... Mais Ezechiel était bien trop jeune pour le savoir, heureusement. Son refus de répondre à ma question accuentua mon sourire. Je savais ce qu'il faisait ici.

- Tu n'as pas besoin d'en fournir. J'imagine que j'aurais plutôt dû te demander pourquoi tu étais de retour ? Eh oui, j'ai mes sources... Je suis au courant que c'est ton come back dans cette ville. Et... honnêtement...

Je me délectai un instant du coup de grâce que j'allais lui administrer. Je n'étais pas sadique, mais avec lui, je pouvais bien m'offrir ce petit plaisir.

- Comment elle s'appelle déjà ? Celle qui t'en veut à mort ? Pas Stella... Sasha peut être ? (Je m'autorisai une pause théâtrale.) Ah, non ! Sara, c'est ça.

La petite Sara. Pas désagréable en soi, mais je la fréquentais pour de bien d'autres raisons... Le point faible d'Ezechiel. J'en étais certaine. Si je l'avais sous ma coupe, la sécurité de Bella (et également la mienne, par la même occasion) était assurée. Il serait sûrement moins sûr de lui après ça.

Ezechiel & Kayla



Celle là, je ne l'avais pas vue venir.

D'accord, j'avais sans doute sous-estimé Ezechiel. Il n'était plus le petit humain fragile que j'avais connu... Et il était bien plus suceptible qu'avant. Il se jeta sur moi en une fraction de seconde et me plaqua violemment contre le mur en me tenant à la gorge. J'avoue que lorsque ma tête heurta la paroi de pierre, je sonnée fus par le choc. Il était nettement plus fort que la dernière fois que je l'avais vu... Il me menaça alors d'une mort certaine d'une voix basse et froide, dans le cas où je toucherais à sa précieuse Sara. Très... cinématographique. N'avait-il pas regardé un peu trop de film de mafia, ces dernières décennies ? En tout cas, c'était très réussi, comme petit effet d'intimmidation.

- Ooouh, du calme, Ez, protestai-je d'une voix agacée (et également assez étranglée, car sa main compressait toujours mon larynx.) D'accord, tu es un garnd garçon de soixante-douze ans, puissant, défenseur du Bien, beau gosse et tout le toutim. OK ? Maintenant, si tu pouvais me lâcher...

Je soupirai devant son manque évident de coopérativité. Il ne savait pas grand-chose de moi, et il se permettait de me juger. Je détestais cette attitude. C'était celle de tous ceux qui me connaissaient, ma soeur mise à part, avait avec moi de mon vivant. Je serrai les dents, refusant de céder à la colère. Je ne lui ferais pas ce plaisir.

- Je n'y ai pas touché, à ta chère humaine. J'ai juste compati à ses malheurs, j'ai été gentille avec elle... Je l'ai consolé après ton départ, quand elle pleurait encore tous les soirs. Elle avait les yeux rouges chaque matin. (J'eus un sourire singulièrement dépourvu d'humour.) Désolée. Ca fait mal ? Oh, ne te méprend pas. J'ai été sincère avec elle ; j'ai déjà connu ça, il y a longtemps. On m'a abandonnée, moi aussi.

Mais qu'est ce qu'il me prenait ? Et pourquoi pas lui confier tous mes chagrins en pleurant à chaude larme au coin du feu, pendant qu'on y était... Je secouai la tête, déconcertée, pour chasser mon ancienne tristesse qui me laissait un arrière goût amer dans la bouche. Je n'allais certainement pas me laisser aller, surtout devant Ezechiel. Sûre de cette conviction, je me libérai de son emprise d'un mouvement sec qui l'obligea à reculer de plusieurs pas, et me passai la main dans les cheveux pour me recoiffer.

- Tu as ruiné mon brushing, je crois, ironisai-je.

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Ezechiel & Kayla



Quelle soirée épatante. J'étais dans une petite ruelle mal éclairée, dans un patelin avec des créatures surnaturelles à tous les coins de rues, occupée à me disputer allégrement avec mon vieil ennemi, ancien grand amour de ma soeur souhaitant maintenant notre mort plus que tout. Avouez que vous n'auriez pas pu l'inventer.

J'analysai la situation. Si Ezechiel repartait de cette rencontre furieux et en plein délire "désir de vengeance sanguinaire", j'avais de bonnes raisons de m'inquiéter de la sécurité ma soeur. Oh, elle pouvait ce défendre, sans aucun doute, mais elle serait complétement prise au dépourvu de revoir Ezechiel. Et jamais je ne permettrais à quiconque de faire de mal à Bella. Jamais. Cependant, me retenir de lui faire des remarques acerbes et le plus blessantes possible était immensément dur. Il était déjà assez difficile de calmer mes envies de meurtre à son égard... Je me forçai à l'écouter d'un air impassible, mais ne pus retenir un ricanement.

- Un être humble ? Laisse moi rire... Comme c'est magnanime de ta part de me laisser en vie. C'est vrai que je n'aurais aucune chance contre toi si on s'affrontait. Franchement Ezechiel, je t'ai connu moins prétentieux...

* Et tu l'as connu en tant qu'ami, aussi *, me souffla une petite voix agaçante dans un coin de mon esprit. Mais elle était si faible, si minuscule, si négligeable, que je parvins très facilement à l'ignorer. Oui, Ezechiel et moi nous entendions bien. Avant qu'il ne s'en prenne à Bella. Je ne pardonnais pas facilement (voire pas du tout) à ceux qui blessaient ma petite soeur. Pourtant, Damon l'avait bien fait... J'écartai cette pensée, mal à l'aise. Damon n'avait pas tenté de tuer Bella. Et il fallait avouer que je tenais plus à lui qu'à Ezechiel.

J'écoutai patiemment ce dernier me répondre d'une voix qu'on pouvait presque entendre trembler d'émotion, et ne pus m'empêcher de songer que si l'on continuait ainsi, il n'y avait plus qu'à sortir les paquets de mouchoirs et les violons. Je remis vite l'atmosphère en place avant de me laisser adoucir. Depuis quand versai-je dans le mélo ?

- Non. Je ne sais rien. Rien du tout. C'est fini, le quart d'heure émotion ? Je n'ai pas coché l'option "drame larmoyant" pour cette scène, que je sache. Je me fiche de savoir quelque chose sur ta relation pathétique avec une humaine. Ce que je veux, c'est t'empêcher de faire du mal à Bella ou à moi - et je précise déjà que tu aurais eu du mal. Autant mettre les choses au clair tout de suite. Je ne reculerai devant rien pour la protéger, Ez. Tu me connais non ? Tu sais que je ne bluffe pas. Alors voilà les règles : ne t'approche pas de ma soeur, ne tente rien contre nous, et je ne toucherais pas à Sara. Sinon... Tu dois avoir compris, j'imagine, intelligent comme tu es. C'est moi qui mène le jeu, cette fois.

J'étais froide. J'étais insensible. J'étais à la limite du sadisme. Je lui arracherais l'amour de sa vie sans vergogne si cela devait maintenir Bella en vie. J'étais inhumaine. C'était, j'en étais certaine, ce qu'il voyait devant lui. Pourquoi jouais-je encore ? J'étais lasse de paraître aussi dépourvue de sentiment. Pourtant, cela me plaisait assez. Seuls les faibles osaient dévoiler leur part d'humanité, non ? Non ?

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